Le texte de l’Académie de médecine fait une différence entre euthanasie et suicide assisté. Est-ce légitime ?
Il y a une différence de forme, mais à chaque fois c’est le même choix de société, le même choix civilisationnel. Dans le cas du suicide assisté, la personne est encore en mesure d’avaler un produit létal. Dans le cas de l’euthanasie, elle n’est plus en mesure d’accomplir un geste volontaire. Sur le plan éthique cela ne fait pas de différence. D’ailleurs le gouvernement rassemble les deux procédures sous la même expression « d’aide active à mourir », bel exemple de novlangue. Il s’agit bien d’aide au suicide dans les deux cas.
Le texte parle d’un droit « à titre exceptionnel », à l’assistance au suicide : naïveté ou stratégie ?
Au minimum c’est d’une très grande naïveté. Et éventuellement il y a une part de stratégie de la part de ceux qui, à l’Académie, sont favorables au suicide. Comme le corps médical est massivement opposé au suicide assisté, et encore plus à l’euthanasie, cela peut être utile sur un plan politicien, pour le gouvernement. Il y a eu des pressions, visiblement.
Les Académiciens évoquent l’exemple de l’Oregon. Pourquoi ?
L’Oregon est tout sauf un exemple. Dans cet Etat, officiellement, vous pouvez obtenir une « kill pill » (pilule mortelle, ndlr) quand les médecins ont établi que vous n’aviez plus que six mois à vivre. Mais en réalité un simple diabète peut suffire pour obtenir un suicide assisté. Donc une grande hypocrisie règne. Par ailleurs, depuis que le cadre législatif a été adopté, il a été allégé : le délai de réflexion est passé de 15 jours à deux jours. Une autre restriction a sauté, le fait de réserver le suicide assisté aux habitants de l’Oregon : on accepte les personnes venant d’autres Etats. On le sait : toute loi qui ouvre un espace contraire à l’éthique ne cesse de s’élargir. Ça a été le cas avec l’avortement, avec la PMA, avec la recherche sur l’embryon. Ça a été le cas pour l’euthanasie en Belgique, au Canada, en Oregon…