La Manif Pour Tous intervient auprès de la Commission de la population et du développement
Du fait de son statut consultatif auprès de l’ONU, La Manif Pour Tous a pu de nouveau intervenir, cette fois-ci auprès de la Commission de la population et du développement dont la 55ème session portera sur le thème : « Population et développement durable, en particulier la croissance économique durable et inclusive ».
La Manif Pour Tous souligne dans cette intervention écrite que toutes formes d’exploitation humaine sont un frein majeur à l’objectif de « croissance économique durable et inclusive » visé par l’ONU dans le cadre de son agenda 2030.
La Manif Pour Tous appelle donc les États Membres à prendre position contre l’exploitation reproductive sous toutes ses formes, dont la gestation pour autrui (GPA, ou pratique des mères porteuses) et le prélèvement d’ovocytes au profit de tiers. Sans cela, ils ne peuvent espérer atteindre leur objectif d’un environnement garantissant aux femmes du monde entier le bénéfice d’un développement profitable au sein d’une économie véritablement durable et résiliente.
L’intervention de La Manif Pour Tous est traduite dans toutes les langues officielles de l’ONU et transmise par l’institution internationale à tous les gouvernements des États Membres. Elle sera aussi publiée prochainement sur le site internet officiel de l’ONU.
Qu’est-ce que la Commission de la population et du développement de l’ONU ?
Cette commission, qui se réunit tous les ans en avril à New York, a pour mission de suivre et d’examiner la mise en œuvre du Programme d’action de la Conférence internationale sur la population et le développement (CIPD) (appelée parfois Conférence du Caire) de 1994.
Elle établit des normes internationales et élabore des politiques axées sur le développement solidaire, équitable et durable à travers le monde. Elle réalise des recherches et élabore des conseils et recommandations liées à la population mondiale et au développement durable.
Le CIPD étant proche des engagements pris dans le cadre des objectifs de développement durable (ODD) de l’agenda 2030 de l’ONU, la Commission de la population et du développement contribue à la mise en place de ces ODD.
Depuis sa création en 2012, La Manif Pour Tous défend le droit des femmes et le droit des enfants. La Manif Pour Tous est en effet convaincue que la défense de ces droits est un facteur essentiel pour assurer un développement durable et la condition d’une croissance économique durable et inclusive qui ne laisse personne sur le bord du chemin.
Dans la perspective de l’accomplissement de l’Agenda 2030, il apparait primordial à La Manif Pour Tous d’œuvrer afin que l’égalité des sexes, l’autonomisation des femmes et leur pleine contribution à l’économie et au développement soient effectives. C’est à ce titre qu’elle intervient régulièrement pour alerter et combattre l’exploitation reproductive, violence sexiste donc les femmes et les filles sont victimes dans le monde entier et frein à leur participation pleine et active à l’économie et au développement durable.
L’exploitation reproductive sévit partout et connait plusieurs formes, toutes fermement combattues par La Manif Pour Tous : la maternité de substitution et le prélèvement d’ovocytes au profit de tiers, que la femme soit bénévole, indemnisée ou rémunérée, que les intermédiaires soient commerciaux, mafieux ou autres, que la pratique soit encadrée ou non dans le pays concerné.
La présente communication a pour but de souligner, encore une fois, combien les femmes et les filles du monde entier sont vulnérables face à cette exploitation en plein essor et comment la crise sanitaire mondiale du COVID-19 a aggravé la situation. Enfin, La Manif Pour Tous expliquera combien toute forme de violence reproductive est un frein majeur à toute croissance économique durable et inclusive et proposera aux parties prenantes des pistes de réflexion pour endiguer ce problème.
Depuis de nombreuses années, les associations et autres acteurs alertent sur la situation économique alarmante des femmes à travers le monde. Majoritaires dans les emplois précaires, elles représentent ainsi 78 pour cent des emplois à temps partiel avant la crise du COVID-19 en France selon une étude d’Oxfam France. Par ailleurs, toujours avant la crise sanitaire, 42 pour cent des femmes dans le monde ne pouvaient pas avoir d’emploi rémunéré en raison de la charge du travail non rémunéré qui pèse sur leurs épaules. Surreprésentées dans les métiers de soin peu ou mal rémunérés, les femmes sont déjà les victimes d’un système qui les place dans une très grande vulnérabilité économique, sociale et culturelle.
La crise sanitaire mondiale a accentué ces inégalités. Les femmes ont été majoritairement en première ligne contre le virus. Elles ont été en outre, puisque déjà en situation de précarité, les premières victimes de la récession économique. Selon ONU Femmes, 47 millions de femmes et de filles à travers le monde risquent de tomber dans l’extrême pauvreté à cause de la pandémie et de ses conséquences.
Déjà très vulnérables économiquement, culturellement, socialement et parfois familialement, les femmes ont vu les inégalités se creuser et des moyens de subsistance déjà faibles se réduire un peu plus.
Or l’exploitation reproductive repose précisément sur la vulnérabilité extrême de femmes et filles réduites à vendre leurs ovocytes et à se louer au profit de tiers. Pratiquée dans le monde entier, parfois légalisée, l’exploitation reproductive sous toutes ses formes, procède toujours de la même mécanique. Les agences, les cliniques, les cabinets d’avocats spécialisés, les hôtels, les tour-opérateurs ont tous besoin de la même matière première et du même outil de production : les ovocytes et l’utérus des femmes. Vulnérables à tous égards, ces femmes sont des proies faciles pour satisfaire les besoins d’un marché toujours plus vorace.
Dans certains pays, tels que l’Ukraine, la Grèce ou encore la Russie, les mères porteuses peuvent toucher l’équivalent de cinq à dix ans du salaire moyen. Il est donc à craindre que les problèmes économiques consécutifs à la crise sanitaire mondiale ne rendent alors inéluctable le fait de devenir les victimes de l’exploitation reproductive pour bon nombre de femmes.
Travailler à un développement durable en laissant de côté la question de l’exploitation reproductive annulerait tous les efforts des parties prenantes. En effet, basée sur l’exploitation d’une grande vulnérabilité, la maternité de substitution, pour prospérer, a mécaniquement un besoin croissant d’une population de femmes pauvres. Le lien direct entre pauvreté et exploitation reproductive est encore plus évident depuis le COVID-19. Ainsi, le Dr Samit Sekhar, directeur exécutif et embryologiste au Centre d’Infertilité Kiran, note que les femmes privées de revenus et prêtes à devenir mères porteuses sont dix fois plus nombreuses qu’avant.
Or l’exploitation reproductive, quelles que soient ses modalités, ne saurait être une réponse acceptable à des difficultés économiques et encore moins un élément de développement. La maternité de substitution, le commerce d’ovocytes ou toute autre forme d’exploitation n’est pas et ne sera jamais un travail décent tel que défini par l’objectif 8 de l’Agenda 2030 et ne sera donc jamais un élément de développement durable.
En effet, la maternité de substitution est une pratique qui, dans son principe même, est une atteinte grave aux droits des femmes et constitue indubitablement une violence à leur égard. Encadrée ou non, commerciale ou gratuite, elle reste une instrumentalisation de femmes utilisées comme « incubatrices ». Il s’agit en réalité d’une pratique sexiste créant une sous-humanité de femmes utilisées pour produire les enfants des autres au risque de leur santé mentale et physique.
Ainsi, cette pratique est de facto contraire à tous les instruments internationaux relatifs aux droits de l’Homme. Pire, elle répond même à la définition de l’esclavage, tel que mentionné par l’article 1er de la Convention relative à l’esclavage de 1926.
Abdiquer ses droits sexuels et reproductifs les plus essentiels pour ne plus avoir faim, n’avoir plus d’autres solutions que de mettre à louer son corps et ses capacités reproductives pour survivre : telles sont les conséquences directes de la crise sanitaire du COVID pour les femmes et les filles du monde entier.
La Manif Pour Tous enjoint donc les Etats Membres et les parties prenantes de mettre au cœur de leur discussion la question de l’exploitation reproductive et du droit des femmes au centre de toute discussion sur le développement durable.
Et afin de garantir aux femmes du monde entier, il est urgent de réfléchir, de façon concertée et globale à protéger les femmes en interdisant la maternité de substitution sous toutes ses formes. Tout autre dispositif législatif serait une concession au marché au détriment du droit des femmes et laisserait passer un message de tolérance à l’égard de l’exploitation de la femme.
À la lumière de ces éléments, il est primordial de rappeler à tous les Etats Membres que les femmes et les filles du monde entier attendent une réponse forte et la garantie qu’elles seront bien partie prenante d’un développement profitable à toutes et d’une économie durable et résiliente.
Se relever de cette crise mondiale et construire un monde durable et inclusif nécessite une action coordonnée forte et rapide pour condamner explicitement toute forme d’exploitation reproductive. Sans cela, aucune solution ne sera véritablement durable et les efforts de la communauté internationale seront vains.
Il est grand temps de prendre la mesure des enjeux actuels et d’agir pour l’abolition universelle de toute forme d’exploitation reproductive.